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« Avant qu’il NE parte » : va-t-il partir ou pas ?

| 06 juin 2018 | par Jean-Christophe Pellat

"NE" est-il indispensable ?

« Avant qu’il ne parte » a le même sens que « avant qu’il parte ». On se passe dans l’usage courant de ce « ne » dit explétif, qui n’est pas à proprement parler négatif (Bon usage, § 1023). On explique son emploi dans des contextes ayant une coloration négative. Le plus important est le complément d’un verbe de crainte : « je crains qu’il ne fasse fausse route » (Bon usage) car, au fond, quand on craint quelque chose, on souhaite que cela n’arrive pas.

« Avant que » situe la subordonnée dans un moment postérieur à la principale : « Elle parvint à rentrer dans la cuisine quelques moments avant qu’Orso ne parût » (Mérimée, « Colomba »). Comme l’action est à venir, virtuelle et pas encore réalisée, elle est présentée avec une certaine incertitude, qui la colore de négativité.

Il est d’ailleurs difficile de formuler une négation véritable avec « avant que », ce qui est possible après un verbe comme « craindre » : « Je crains qu’il ne vienne pas / plus/ jamais... ». Comme quoi l’avenir n’est jamais sûr.

Jean-Christophe Pellat

Jean-Christophe Pellat est professeur de Linguistique française à l’Université Marc Bloch – Strasbourg 2.

Ses enseignements et ses recherches portent sur la grammaire et l’orthographe françaises, dans leurs dimensions historiques, descriptives et didactiques. Il est co-auteur d’un ouvrage universitaire de référence, Grammaire méthodique du français (PUF, 1994).

En complément de ses activités en France, il est responsable de différentes actions d'enseignement du français en collaboration avec des universités étrangères, notamment en Azerbaïdjan, en Iran et aux États-Unis.