Le choix entre les prépositions « de » et « en » pour introduire un nom de matière s’explique par l’évolution de la langue. On emploie « de » selon la tradition classique, puis « en », « emploi plus récent, d’abord contesté, mais pleinement passé dans l’usage et accepté par l’Académie depuis 1992 » (« Bon usage », § 355 a 1°). « Une cheminée de marbre remplaça l’ancienne » (H. de Balzac). « Un magnifique buste en marbre du cardinal de Richelieu » (Stendhal). A. Daudet emploie les deux prépositions avec le même nom : « Il était une fois un homme qui avait une cervelle d’or ; oui, madame, une cervelle toute en or […], une cervelle en or » (Lettres de mon moulin).
Même si ces deux prépositions ont des sens très variés, « en » permet d’éviter l’ambiguïté de la préposition « de », due à sa grande polyvalence. Dans « un bol de terre », le second nom peut désigner la matière (= « un bol de porcelaine »), mais aussi le contenu (= « un bol de café »). Pas de doutes avec « un bol en plastique », c’est bien la matière plastique.
En revanche, on préfère « de » dans les emplois figurés : « une santé de fer, un visage de marbre ». « Sabre de bois ! » est la formule préférée du comte de Champignac, ami de Spirou, qui fleure bon l’ancien temps. Les amateurs de Star Wars préfèrent le « sabre laser » : c’est plus simple sans préposition.
Jean-Christophe Pellat est professeur de Linguistique française à l’Université Marc Bloch – Strasbourg 2.
Ses enseignements et ses recherches portent sur la grammaire et l’orthographe françaises, dans leurs dimensions historiques, descriptives et didactiques. Il est co-auteur d’un ouvrage universitaire de référence, Grammaire méthodique du français (PUF, 1994).
En complément de ses activités en France, il est responsable de différentes actions d'enseignement du français en collaboration avec des universités étrangères, notamment en Azerbaïdjan, en Iran et aux États-Unis.